Cyril Degrilart nous explique comment son cabinet de 4 personnes s’organise pendant la crise du coronavirus et essaie de maintenir son activité.
Vous avez mis en place le télétravail dans votre cabinet depuis le lundi 16 mars. Tous vos collaborateurs sont-ils concernés ?
Les 4 collaborateurs et moi-même sommes tous en télétravail. Nous travaillions déjà avec des ordinateurs portables. Lundi 16, nous sommes allés au cabinet récupérer nos doubles écrans, nos claviers amovibles, etc. pour mettre en place toutes les infrastructures à domicile.
Votre cabinet pratiquait-il le télétravail avant la crise du coronavirus ?
Nos collaborateurs avaient la possibilité de télétravailler mais tous s’y refusaient car ils détestent ça. Ils préfèrent travailler de visu en équipe. Là, ils n’ont pas le choix.
A-t-il fallu équiper vos collaborateurs ?
Nous avons tous les outils de travail collaboratif à distance depuis des années (cloud, serveurs…). Nous sommes complètement dématérialisés. Aucun travail informatique spécifique n’a été effectué pour cette crise. Ce qui a changé toutefois, c’est que nous utilisons à grande échelle Microsoft Teams pour partager nos documents, travailler ensemble en direct ou encore faire des vidéoconférences. Nous faisons des réunions régulières.
Justement, comment vous organisez-vous en interne ? Quelle est votre journée type en ce moment ?
Tous les matins, nous faisons un call Teams tous ensemble durant 20-30 minutes pour voir comment s’est passée la journée précédente et s’organiser pour la journée à venir. On se répartit les tâches, on réaffecte les binômes. Le travail en équipe est conservé pour maintenir notre dynamique habituelle.
Durant la journée, l’équipe travaille en binôme ou avec moi. Sur Teams, nous avons créé plusieurs canaux dont un dédié aux news sur le Covid-19 (informations du Conseil supérieur de l’ordre des experts-comptables, des ministères). Cela permet aussi que tous les canaux ne soient pas envahis par le Covid-19. Pour ma part, je suis en visioconférence quasiment toute la journée : animations de formations online, réunions avec les clients, les confrères ou encore avec l’Ordre. Nous maintenons les réunions prévues.
Et du côté des clients, rencontrez-vous des difficultés à travailler à distance ? Certains ont encore l’habitude de venir déposer leurs pièces comptables directement au cabinet….
Sur la partie comptabilité pure, nous n’avons pas ce problème car depuis deux ans environ, le client a l’habitude de déposer ses pièces lui-même sur notre plateforme collaborative.
Au début de la crise, nous avons appelé tous nos clients pour savoir déjà comment ils allaient puis comment ils imaginaient leur business dans ce contexte. Nous leur communiquons toutes les informations officielles (et seulement celles-ci) et nous assurons de la continuité de leur entreprise (en terme de prêts, de trésorerie à court terme…). Dans un second temps, il s’agit de savoir comment réinventer leur business.
Nous venons d’ailleurs de lancer une série de vidéos à l’attention des chefs d’entreprise sur les bonnes pratiques pour bien s’organiser et imaginer le futur de leur business. Cela nous permet aussi de garder un lien avec nos clients car, depuis le début de la crise, nos missions d’accompagnement et de conseil hors Covid-19 (sur le business, l’organisation digitale de l’entreprise…) sont très diminuées. Le travail à distance est compliqué sur ce type de missions. Depuis le début du confinement, les chefs d’entreprises sont, à juste titre, beaucoup moins focalisés sur le développement de leur activité. .
Dans quel état d’esprit sont aujourd’hui vos clients ?
Tous nos clients TPE-PME sont inquiets. Même les entreprises du digital, peut-être un peu moins touchées au départ, voient leurs carnets de commandes se vider. Nos clients e-commerçants qui achètent en Chine et qui revendent en France sont quant à eux impactés depuis janvier.
Plusieurs mesures d’urgence économique sont mis en œuvre, notamment l’indemnisation en cas d’arrêt partiel de l’activité. Il semble que des dossiers soient retoqués. Avez-vous activé cette mesure pour certains de vos clients ?
Nous sommes très prudents. Tant qu’il n’y a pas de mesures officielles, on ne se lance pas. Evidemment, le restaurant qui ferme ne pose pas de difficulté mais sur d’autres activités, nous faisons attention. Notre maître-mot est d’attendre et de ne pas trop anticiper les résultats des mesures annoncées. Tout n’est pas encore mis en place [le décret et l’ordonnance sur le chômage partiel n’avaient pas encore été publiés lors de la réalisation de cette interview].
Vos clients demandent-ils le report de leurs échéances fiscales et sociales ?
Pas forcément. Si le client a la trésorerie à trois mois, nous lui conseillons de ne pas étaler le paiement et de régler tout de suite. C’est au cas par cas selon la situation de l’entreprise. Nous cherchons avec nos clients la solution la plus intelligente.
Quel sera l’impact de cette crise sur votre cabinet ?
L’impact financier sera clairement énorme. Le mois de mars sera catastrophique en matière de rentabilité, c’est inévitable. Comme toutes les organisations, nous allons accorder des étalements.
Nous ne pourrons pas facturer au temps passé les conseils sur le Covid-19. De toute façon, nous ne serons pas rentables sur le travail du mois. Nous avons toutefois la satisfaction d’être utiles à nos clients. Pour l’instant, nous n’avons pas mis en place de chômage partiel au sein du cabinet mais ce n’est pas exclu si la crise dure.
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