Savoir communiquer son expertise à l’oral est un atout précieux pour convaincre en public, devant les équipes et les clients, et en toutes circonstances.
On ne naît pas éloquent, on le devient ! Et c’est un atout supplémentaire, pour un expert-comptable. L’éloquence permet de renforcer sa relation avec ses clients, d’améliorer la présentation des travaux réalisés par le cabinet et d’augmenter la capacité de valorisation financière des travaux. Par extension, améliorer son éloquence renforce l’image du cabinet d’expertise comptable en interne, mais également l’image de l’ensemble de la profession du chiffre.
Les dix points pour optimiser son éloquence
Être à l’aise à l’oral est rarement inné. Voici quelques points pour aider l’expert-comptable à atteindre ses objectifs.
1. Accordez autant d’importance à la forme qu’au fond.
Beaucoup considèrent encore que c’est le fond qui est important et la forme, accessoire. Pas du tout ! C’est de l’alliance harmonieuse des deux que dépendra la réussite d’une intervention. Un discours brillant sur le papier peut effectivement très mal passer à l’oral. En effet, les faits ne parlent pas d’eux-mêmes à l’oral ! Il est indispensable de mettre ses idées en scène pour qu’elles aient le maximum d’impact sur l’auditoire. Tout cela nécessite bien sûr un gros travail en amont.
Travail sur le fond du discours, puis répétition de son intervention pour maîtriser la forme et verrouillage de l’environnement matériel : ce sont les trois clés d’une intervention réussie.
Notre conseil : Savoir parler en public consiste à véhiculer des messages. Ils passent par les mots, mais également par les gestes, par la manière de s’exprimer et par l’enthousiasme communicatif que l’expert-comptable véhicule ! |
2. Posez-vous les bonnes questions
Que l’on s’exprime devant un congrès de quatre cents personnes ou devant le jury d’un appel d’offres, la première étape de la préparation d’une prise de parole en public consiste à se poser trois types de questions.
Quelle est la composition de mon public ? Quel est l’état d’esprit du public ? Quelles sont ses attentes, ses motivations, ses craintes, son niveau d’information ?
Quel est l’objectif de l’intervention ? Motiver un client, des partenaires ? Vendre son projet auprès de ses associés ou confrères ? Il est important que cet objectif soit clair pour l’orateur.
Quelle est la stratégie pour atteindre ces objectifs ? Sur quels leviers du public est-il possible d’agir (défis personnels, volonté de croissance…) ? Ce troisième point est capital pour trouver les arguments qui vont percuter.
Les réponses à ces questions permettent de construire le discours qui doit respecter deux impératifs : concision et pédagogie.
Notre conseil Pas d’improvisation ! Savoir parler en public nécessite de préparer efficacement et précisément son allocution. Il est important de toujours prendre en considération son public, de ne jamais le sous-estimer. Quels que soient le nombre, la qualification ou l’âge des participants. Les trois typologies de questions présentées ci-dessus aident l’expert-comptable dans la préparation de son discours. |
3. Soyez concis …
C’est un fait, pour parler trois-quarts d’heure, il faut un talent fou et un contenu passionnant ! Un discours de vingt minutes percutant et structuré constitue déjà un bon travail. La concision, c’est l’assurance de ne pas ennuyer l’auditoire. Les spécialistes de la communication l’affirment : le public ne retient jamais plus de deux ou trois messages dans une présentation.
Une fois les premières questions posées concernant les objectifs généraux de l’intervention, l’orateur se concentre sur ses idées fortes et uniquement sur ces points. La bonne pratique est d’aller « droit au but » pour capter l’attention de l’auditoire, et non construire son discours comme une dissertation scolaire en présentant longuement son sujet.
Notre conseil La concision des propos vaut également pour les supports PowerPoint ! Les diapositives ont uniquement un objectif de support à la démonstration (et non l’inverse). L’expert-comptable pourra opter pour un support le plus visuel possible, en favorisant les schémas et illustrations, plutôt que de longs discours. Si la diapositive est plutôt textuelle, la bonne pratique est de se limiter à cinq puces au maximum par page. |
4. … Et pédagogue
Autre condition de réussite : se mettre à la portée de son public. Cela suppose d’abord d’illustrer ses idées. Pas d’idée sans exemple et pas d’exemple sans idée ! Parce que c’est à partir de l’image qu’on accède au concept. Trop d’orateurs restent centrés sur eux-mêmes. Il faut, au contraire, se mettre à la portée du public avec un vocabulaire adapté. Ne pas utiliser de jargon si le public ne connaît pas le sujet et livrer des exemples qui lui parlent. Socrate disait déjà : « Quand je parle à un forgeron, je lui raconte des histoires de forgeron ».
Notre conseil Le public est toujours intéressé par les mises en situations concrètes et pratiques, ce qui constitue un point fort d’éloquence pour l’expert-comptable ! Pour alimenter et vitaminer son allocution, il est tout à fait possible d’agrémenter ses propos avec une anecdote, un chiffre clé ou une pratique professionnelle réelle. |
5. Ne lisez pas votre intervention
Autre constat : on « passe » mal quand on lit un texte, le visage plongé dans ses feuilles, sans regarder le public. Une petite fiche synthétique est préférable, où il est exposé succinctement le fil conducteur de l’exposé. Cette fiche est utile en cas de trous de mémoire, elle servira de filet de sécurité « au cas où ».
Notre conseil Que l’on soit en animation en présentielle ou en ligne, la fiche synthétique a pour objectif de formaliser le fil conducteur précis de l’orateur. L’expert-comptable peut ainsi construire visuellement ses propos, entre les informations techniques et les mises en situation pratico-pratiques. |
6. Regardez votre public
La maîtrise du fond fait partie des valeurs immuables des professionnels du chiffre. Il s’agit maintenant de la faire passer au public. Pour cela, il est important de garder en tête qu’un auditoire est, par nature, passif. C’est à l’orateur de créer la relation avec lui, « de le faire passer sur On ». Et cela dépend en grande partie de l’engagement physique de l’expert. Pour impliquer le public, il faut donc faire naître chez lui le sentiment que l’orateur s’adresse vraiment à lui. Le corps est l’outil qui fait passer cette énergie. Posture, expression du visage : tout compte. Mais ce qui est essentiel, c’est le regard. On tient une salle avec les yeux.
Notre conseil Le professionnel du chiffre veille à porter en permanence un regard sur l’ensemble de l’assistance. Essayer de ne pas oublier de bien regarder aussi les personnes tout à gauche, une partie où le regard ne va pas naturellement. Le contact visuel avec la salle a également pour objectif de rectifier le tir « sur le fond et la forme », si nécessaire. Si le confrère constate que la salle est moins réceptive, il est possible de changer subtilement sa manière de s’exprimer : phrases plus courtes, plus de silences, et pourquoi pas sortir de son exposé pour interpeller les participants et regagner leur attention. En visioconférence, regarder son public est également une bonne pratique. Bien entendu, cet exercice nécessite de se projeter puisqu’il ne regarde pas réellement le public, mais uniquement l’oeil de l’objectif de la webcam. |
7. Modulez votre voix
Capital pour gagner l’auditoire : la voix. On le constate souvent : on ne parle jamais assez fort ! Car la perception du volume de sa voix est toujours exagérée par rapport à ce que reçoit le public. En clair, vous avez l’impression d’hurler alors qu’on vous entend juste bien (sauf si vous hurlez vraiment, bien-sûr !). Parler plus fort que d’accoutumée oblige à mettre plus d’expressivité – vecteur de conviction – dans la voix. Il est structurellement impossible de tenir un discours monocorde quand on parle fort. D’autant plus qu’il n’est pas nécessaire de crier pour se faire entendre. Il suffit de bien se placer – épaules relâchées, buste droit, cage thoracique ouverte – et de respirer en gonflant son ventre.
La voix porte alors sans effort physique, on se sent plus à l’aise et on capte mieux l’attention de son interlocuteur.
Notre conseil Le volume est important pour renforcer le charisme du professionnel du chiffre. Il n’est néanmoins pas tout dans la voix. Pour retenir l’attention du public, trois autres éléments sont également à maîtriser : • l’articulation : cet élément est à soigner, il est beaucoup plus agréable d’écouter un orateur qui articule et prononce toutes les syllabes. Le port du masque renforce par ailleurs la nécessité d’articuler davantage, pour être davantage audible et compréhensible ; • le débit de parole : nous avons tous pour habitude de parler trop vite. Dans le cadre d’une prise de parole en public, il convient de parler moins vite afin que l’auditoire comprenne mieux les propos tenus par l’orateur ; • la modulation : dans le cadre de sa préparation, l’expert-comptable identifie les mots qu’il pourra mettre en valeur, pour contribuer à retenir l’attention du public. |
8. Osez les silences
Un silence attire l’attention du public et lui permet d’intégrer ce que l’on vient de dire et donne du relief aux mots qui vont suivre. S’imposer des silences est une excellente façon de chasser nos tics verbaux (heu… c’est-à-dire… donc…), destinés justement à meubler des silences synonymes d’échec dans notre passé d’écolier.
Notre conseil Dans le cadre de la préparation de son allocution, l’expert-comptable identifie les moments choisis pour incorporer des silences. Ces moments de silences peuvent avoir lieu, par exemple, lors d’une incitation à la réflexion personnelle, lors d’une explication d’un sujet complexe, ou lorsque l’orateur souhaite interpeller l’auditoire sur un point précis. Point fort du silence pour le professionnel : il s’agit également d’un moment intéressant pour reprendre sa respiration et réfléchir en temps réel sur le fil de son discours ! |
9. Mettez-vous en avant
La position dans l’espace compte aussi. Un orateur ne peut pas se cacher près d’un pilier, dans le décor ou derrière son ordinateur, ou même derrière ses diapositives PowerPoint. L’orateur se doit de se positionner au centre de la scène, c’est la vedette de cette prise de parole !
C’est justement cette situation qui vous effraie ? Au contraire : plus on se met en avant, plus on capte l’attention du public… et plus on se sent à l’aise. Parler debout et s’avancer vers l’auditoire fait se sentir plus proche des gens. Le public apprécie justement qu’on aille à sa rencontre.
S’investir dans son discours est la condition sine qua non de réussite. Par le regard, par la force de la voix, il s’agit d’être présent auprès du public si l’on veut être écouté.
Notre conseil Dans une prise de parole en public, l’appréhension et le trac ne quitteront probablement jamais le professionnel du chiffre. Néanmoins, le fait de se mettre en avant contribue à une spirale positive entre l’orateur et son public : l’expert-comptable donne le meilleur de lui-même et transmet de l’énergie. Le public la ressent et redonne ce qu’il reçoit. Ce qui donne confiance au professionnel, qui y trouve finalement du plaisir à l’exercice. |
10. Souriez
Dernier élément : souriez !
Sourire aide, c’est une façon de montrer que l’orateur est enthousiaste à l’idée de partager son expérience et ses compétences, de s’exprimer devant le public. Cela met l’orateur et le public dans un état d’esprit positif.
Notre conseil Parler en public demande un engagement à la fois physique et psychologique, et c’est cet engagement qui permet de capter l’écoute, de convaincre… et cela procure un réel plaisir d’animer. Même si l’engagement ne suffit pas : être à l’aise en public est tout autant le fruit d’un travail, d’un apprentissage et de beaucoup d’entraînement ! Une chose est sûre : les confrères paraissant le plus naturel sont ceux qui ont le plus travaillé. |
La maîtrise de la prise de parole en public constitue une des compétences comportementales – ou soft skills – que tout expert-comptable peut continuer à développer dans le cadre de son exercice professionnel. Ce développement personnel renforce à la fois l’image de son cabinet, la valeur des travaux de ses équipes, et de manière générale, la maîtrise de la qualité de la profession.
Paru dans la Revue Française de Comptabilité n°548 du mois de Décembre 2020.